Dans les rues matinales [Solo]

La vie est nulle, et ensuite, on meurt.

A ce moment précis, cette citation tournait dans la tête d’Eliana. De façon naïve, mais répétée, comme si elle cherchait à s’insinuer encore plus dans son cerveau, à s’infiltrer dans la moindre de ses pensées. La jeune fille était fatiguée, il était tôt, elle se trouvait quasi-seule dans une ruelle déserte, et elle n’avait nulle part où aller.

Comprenez que des accès de folie passager la prennent…
Elle avait choisi ce moment propice, celui où l’aube se lève à peine, pour ne pas avoir à supporter la migraine infernale et les sentiments diffus des autres. C’était toujours ainsi, lorsqu’il y avait foule. Elle entendait la colère, la peur, le doute, le vice, dans une sorte de mélange insipide qui lui donnait une migraine durable et ne cessait que lorsqu’elle se trouvait seule. Elle pouvait alors enfin se concentrer sur ce qu’elle ressentait en elle-même.

Seulement voilà, depuis hier matin, Eliana ne ressentait plus rien. Absolument rien. Elle était vide de toutes émotions, de tous sentiments, déconnectée de la réalité. C’était étonnant comme, lorsque le cœur ne dirige pas, le cerveau prend la relève. Elle avait fait son sac, elle était sortie dans la rue, elle avait même pensé à rabattre la capuche de sa cape pour qu’on ne puisse pas avoir son visage.

Un masque grimaçant pour des gestes mécaniques.
Voilà ce qu’il restait d’Eliana depuis la capture de Nyhal.

Elle n’avait aucune idée de quoi faire à présent. Ou plutôt, si, elle avait un objectif, plutôt imprécis. Comme une sorte d’idée timide qu’on n’ose pas encore regarder en face. Vous savez, le genre de plan débile et irréaliste qu’on se fait parfois… Là, c’était très simple. Le plan de base était de…

« … provoquer l’A.R.P.I, retrouver Nyhal et revenir ici en un seul morceau. Ouais, ça me parait probable, comme plan ! »

Soudain, quelque chose. Du genre… amusé ? Eliana fit volte-face et fronça les paupières. Elle n’était plus seule. Et elle venait de parler à voix haute. Et zut, de zut, de re-zut ! Dévoiler son plan ainsi, dans une ville étroitement surveillée et proférer des menaces contre une organisation telle que l'A.R.P.I. ... était-ce vraiment une bonne idée? Elle attendit, tendue, sa silhouette encapuchonnée semblant se figer dans la pâle obscurité.

L'homme qui se présenta alors lui parut presque... inoffensif. Chauve, le ventre bedonnant, il ressemblait plus à un ivrogne cuvant son vin qu'à une véritable menace. Mais il y avait quelque chose dans son regard, une sorte d'étincelle qu'elle ne pouvait s'expliquer. Intérieurement, elle se traita d'idiote.

* Des étincelles, maintenant! Vraiment, Eli, tu es... trop naïve. Reprends toi ma grande, c'est pas le moment de flancher! Être parano, d'accords, mais passer pour une vraie folle à lier, ça non. Tu dois montrer aux gens que tu n'existes pas. Te fondre dans la masse. Respire... calme... *

Tandis qu'elle dialoguait ainsi avec elle-même, essayant de s'auto-persuader des avantages de sa fuite, l'homme l'observait. Malgré son allure négligé, il portait des vêtements de marque et quasi-neufs, et de nouveau Eliana se surpris à penser qu'il n'était pas ce qu'il semblait être.

« _ Une raison particulière à votre curiosité à mon égard ? demanda-t-elle sous son regard insistant tout en tentant d'employer un ton diplomatique
_ C'est assez rare pour une jeune fille de se promener seule à une heure aussi... matinale.
_ Je suis une lève tôt, répliqua-t-elle »

La voix de l'inconnu était basse, mais attirante. Le genre de voix qui vous met tout de suite en confiance et vous délie la langue... Il n'était pas difficile de comprendre que cet homme comblait son physique peu avantageux par une conversation à toute épreuve. Néanmoins, son ton paraissait simplement amusé, il ne semblait éprouver aucun intérêt particulier.

Quel étrange conversation, aux premières lueurs de l'aube, dans une rue froide et grise...

« _ Jolie épée, continua l'homme sur le ton de la conversation, elle a dû vous coûter cher...
_ C'est... le cadeau d'une amie, balbutia Eliana
_ Je vois. Vous savez... je ne pense pas que cet endroit soit sûr pour vous. Vous devriez rentrer chez vous.
_ Je n'ai pas de chez moi. Enfin... je ne peux pas y retourner, vous comprenez? »

Mais pourquoi lui disait-elle cela de façon si facile, comme s'ils s'étaient connus depuis des années et des années? De nouveau, le mot naïve traversa son esprit. Et une autre idée le suivit rapidement...

« _ Mon mari me battait, enchaîna-t-elle, il cognait fort. Je ne pouvais rien faire contre lui. J'ai attendu, attendu encore, et hier soir, alors qu'il s'était assoupi, je l'ai tué. Avec cette épée. Le sang coulait partout sur le sol... J'ai nettoyé attentivement, pris mes affaires; et je suis partie. »

Tout en achevant son récit, Eliana trouva le mensonge facile. Elle avait parlé d'une voix assurée, presque convaincue elle-même de ce qu'elle disait. On pouvait deviner les détails macabres. C'était parfait. L'homme, nullement désarçonné, se contenta de nouveau d'un sourire amusé.

« _ Vous n'avez pas l'air d'une dangereuse criminelle... murmura-t-il
_ Les apparences sont trompeuses, répliqua-t-elle
_ Et donc, vous cherchez sans doute un endroit où vous cacher pour qu'on ne puisse vous reprocher votre crime ?
_ Euh... oui, c'est cela.
_ Essayez Mertand. Là-bas, personne ne viendra vous trouvez! Il parait qu'ils cherchent des mercenaires pour accomplir toute sorte de chose... »

Mertand... Ce mot éveilla la curiosité de la jeune fille. Elle n'était jamais sortie des limites de sa ville, et l'aventure lui donnait un goût de rêve interdit. Souriant de façon mutine, elle tourna les talons et commença à marcher. L'homme la siffla, et lui fit un simple signe de la main, avant de disparaître du côté opposé. Drôle de bonhomme...

* Il m'aura au moins appris quelque chose. Direction Mertand... *

Son sourire s'élargit. Elle avait enfin un but. Une idée fixe. Un choix à faire.
Enfin, la chance semblait lui sourire.

[ ~> Va à Mertand. (Sujet pas encore créer.)]

[Je suis rouillée... ça craint. Pardon d'avance à celui qui devra se débrouiller avec ça... -.-'
Edit: Et voilà, finit! Bon, c'est toujours aussi merdique mais dans un sens je m'en fiche vu que personne n'aura à galérer avec mon post derrière mouhaha. Enfin... ]

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